Confinement : le défi du lien social au temps de la distanciation physique
Lettre de la Fédération no 18 – mai 2020
Combien de « Bonhommes Hiver » n’auront pas brûlé cette année ? Les annulations en cascade de cette fête emblématique du lien social auraient pu laisser à ce printemps un goût d’inachevé. Créer du lien social, le favoriser, le renforcer entre habitant·e·s de toutes les générations et de tous horizons … C’est la raison d’être même de l’animation socioculturelle (ASC). Dès lors, comment continuer de « faire lien » et d’alimenter ce vivre-ensemble dans les quartiers lorsqu’il n’est plus possible de se voir, lorsqu’il n’y a plus de lieu ni d’espace public pour se retrouver ni fabriquer au quotidien les potions de ce ciment ? Lorsqu’on ne sait pas combien de temps cette situation durera ? Passé le choc de l’annonce du confinement, les équipes et les comités des centres d’ASC ont très rapidement déployé l’une de leurs grandes forces : la réactivité pour rester au contact de leurs publics pendant cette période très particulière. Les projets mis en place, parfois en quelques jours, sont foisonnants. Ils démontrent une fois encore la vitalité du terreau associatif de l’animation socioculturelle genevoise et sa capacité à se réinventer au plus près des besoins. Tendances et esprit des « lieux confinés de l’ASC » à travers les expériences de la maison de quartier de la Concorde (AHQC), le centre de loisirs et de rencontres du Grand Saconnex, Pré en Bulle, la maison de quartier des Pâquis et la maison de quartier Sous l’Etoile.
« Au revoir, je ne sais pas quand on se reverra »
Vendredi 13 mars 2020. La date ne s’oubliera pas de si tôt et ce n’est pas à cause de la superstition qui la poursuit d’habitude. Ce jour-là a marqué l’annonce du début du confinement en raison de la pandémie de Covid-19, et avec elle la nécessaire fermeture de tous les centres d’animation socioculturelle de Genève. Pour celles et ceux qui les font vivre, la semaine qui a suivi est passée à la vitesse de la lumière tant il y avait à faire pour annuler les prochaines fêtes, mettre entre parenthèse les projets en cours, fermer les accueils, informer les parents et les jeunes, suspendre les cours de danse, de couture ou de musique, faire les demandes de chômage partiel pour les employé·e·s touché·e·s par une réduction d’horaires de travail, organiser les conditions du télétravail pour les équipes professionnelles, faire corps au sein des comités, etc.
Et puis il a fallu fermer la porte du centre, « se retirer » du quartier, dire au revoir sans savoir quand on se reverra. Chacun·e en a bien compris la nécessité et en a bien pris la mesure mais pour autant, l’impact émotionnel est fort. « Il fallait que nous donnions l’exemple », explique Thibaut Lauer, animateur à la MQ de la Concorde, « Mais c’était difficile. J’ai eu du mal à quitter le quartier. Je l’ai ressenti comme une sorte d’abandon ». Ce sentiment est d’autant plus vif quand les activités visent des publics fragiles, comme les jeunes ou les aîné·e·s. Et qu’il vient s’ajouter à sa propre inquiétude face à cette situation inédite et angoissante.
Car pour les professionnel·le·s comme pour les membres de comité, il a aussi fallu gérer individuellement ce choc : se protéger, protéger sa famille, organiser le quotidien, concilier l’école aux enfants, les courses pour leurs proches, les permanences du centre, et se familiariser avec un nouvel environnement de travail (à la maison) et de nouveaux outils comme les zoom ou les skype pour rester en lien avec le reste de l’équipe, etc.
« Faire quartier » malgré tout
Beaucoup d’animatrices et animateurs des centres ont répondu aux appels de la FASe pour donner des coups de main dans les foyers de l’Hospice général ou se mettre à disposition des communes. Mais « notre métier est essentiel au bien-vivre du quartier, d’autant plus dans cette période », rappelle Thibaut Lauer. « Il s’agit donc de continuer de tisser le lien et même de saisir ce temps comme une opportunité pour renforcer la cohésion sociale ». Pour tous les centres, il était nécessaire et important de mettre en place une forme de « service minimum » pour leurs publics.
« Quand on a appris que les accueils allaient être fermés, dans les deux jours, nous avons produit un flyer pour proposer un service de courses soutenu par les jeunes pour les ainé·e·s qui ne pouvaient pas sortir de leur domicile », explique Thibaut Lauer.
Du côté du centre de loisirs et de rencontres du Grand Saconnex. Annelise Marti, animatrice, raconte : « Rapidement, dès la première semaine, nous nous sommes dit que nous devions avoir nos propres actions, qu’il fallait garder le lien avec les parents, montrer que même si le centre était fermé, nous étions là pour répondre aux besoins, parfois d’autant plus aigus, en particulier pour les familles en situation fragile et précaire. La plupart de celles que nous avons appelées étaient étonnées que nous les contactions et toutes étaient contentes que nous prenions de leurs nouvelles ». Ces contacts ont offert des espaces aux familles pour dire comment elles vivaient le confinement mais aussi verbaliser des besoins, permettant ainsi de concevoir des projets. Ils ont aussi souvent permis aux équipes de préciser ou d’expliquer les informations officielles sur la conduite à tenir pendant le confinement, en particulier pour les familles allophones ou les plus jeunes.
« Notre enjeu était de garder le lien avec tous nos publics et de maintenir la visibilité de la MQ », explique Leonor Perréard, directrice de la maison de quartier des Pâquis. « Nous voulions pouvoir fournir des informations sur la situation, rediriger les besoins, faire de la prévention chez les jeunes, soutenir les parents, etc. Bref, continuer de tricoter le lien et d’offrir un espace d’écoute, d’échange et de discussion. »
Des permanences téléphoniques assurées plusieurs fois par semaine dans la plupart des centres interviewés prolongent ces premiers contacts, recréant ainsi une forme d’accueil tout public. Aux Pâquis, les enfants aussi peuvent appeler pour bavarder, parce qu’il n’est pas facile pour eux de ne plus avoir d’autres référent·e·s adultes que leurs parents.
Et puis, animatrices et animateurs, monitrices et moniteurs ont partout déployé des trésors de créativité et mis sur pied une ribambelle de projets et d’initiatives.
S’appuyer sur l’existant
Pour rassurer autant que recréer une forme de proximité, les centres ont bâti des projets covid en se fondant sur l’existant. Pré en Bulle a anticipé ! Avant même le début du confinement, il était important de sensibiliser les plus jeunes aux «gestes barrières ». L’équipe a donc fait appel à « Super Printemps », un personnage apparu pour la première fois en 2012 dans les Grottes, pour affronter « Super Virus » dans une vidéo diffusée sur YouTube et les réseaux sociaux.
Puis le confinement est arrivé, il n’était plus question pour Super Printemps de sortir dans les rues. Les personnages récurrents du programme enfants ont rapidement pris le relais pour illustrer la brochure “Bonjour les enfants” diffusée en collaboration avec les écoles du quartier des Grottes pour aider les plus jeunes à vivre et à s’occuper pendant le confinement. Une multitude d’autres outils ou propositions ont été recensés dans une page « Info famille confinement ».
Aux Pâquis, le Chateau Hebdo (déjà quatre éditions) « remplace » l’accueil du Château-Bruyant. Ce journal destiné aux enfants et à leurs parents est disponible tous les mercredis en version papier dans une caissette devant Château-Bruyant ou sur le site internet de la MQ. Délibérément personnalisé avec des recettes de cuisine manuscrites ou des jeux autour des photos des « monos », le journal joue sur la proximité afin que chaque enfant retrouve dans ces pages un environnement familier.
Un cadavre exquis téléphonique pour développer l’imaginaire à la Concorde
Lorsque l’on est enfant et qu’on est confiné à la maison à longueur de jours et de semaines, il est crucial de pouvoir nourrir son imaginaire. Le projet de « cadavre exquis participatif au téléphone » qui vient juste de voir le jour à la MQ de la Concorde répond à ce besoin. Le concept est simple : une monitrice a écrit un début d’histoire qu’elle a lu par téléphone à un enfant en lui demandant d’imaginer une suite. De téléphone en téléphone, par la voix, l’histoire évolue, avance. « A la fin du confinement, on espère que l’histoire sera lue », conclut Thibaut Lauer. Au-delà de l’histoire, ces téléphones sont une belle manière de prendre soin des enfants tout en établissant le lien avec les parents, ce qui est d’autant plus important lorsque les situations familiales se sont dégradées.
Réseaux sociaux et outils en lignes
Aux Pâquis, le Kado se virtualise
Pour garder le lien avec les ados qui fréquentent habituellement le Kado, le local d’activités qui leur est dédié aux Pâquis, l’équipe d’animation a imaginé un « Kado virtuel » sous la forme d’un compte Instagram et un groupe WhatsApp. Pour la MQ, c’est un petit défi car il faut à la fois être dans la séduction (contenus sexy et courts) et la prévention (éléments factuels), sans pouvoir dialoguer comme dans une discussion en réel : il est beaucoup plus difficile de désamorcer une discussion ou de la relancer, de percevoir le ressenti des jeunes. ll a aussi fallu installer de nouvelles habitudes avec les jeunes, sans toutefois complètement se détacher du Kado réel. Ainsi les « horaires d’ouverture » sont balisés, de 16h à 19h. Et les professionnel·le·s maintiennent une posture justement professionnelle : le réseau social est avant tout un outil d’animation, avec un langage lui aussi balisé. « Cette présence est nouvelle pour eux comme pour nous », explique Nelson Brás Gonçalves, animateur chargé du projet. « Même si on paraît un peu à côté de la plaque à leurs yeux, à travers cette présence, nous leur signifions que nous nous intéressons à eux, que nous sommes là ». Et les idées foisonnent pour faire vivre ces réseaux sociaux : challenges culinaires, fabrication de cosmétiques, quizz pour jouer ensemble, jeux en lignes, vidéo d’activités physiques. « Ce sont aussi des espaces de dialogues : les jeunes y expriment ce que cela leur fait de ne pas pouvoir sortir et ce qu’ils observent chez leurs parents qui vivent mal le confinement », ajoute Nelson Brás Gonçalves.
Un blog tout public au Grand Saconnex
Après l’envoi par email aux familles de lettres d’information et de fiches pédagogiques pour les aider à s’organiser au quotidien avec les enfants, au fil des jours, l’équipe a eu l’idée d’ouvrir un blog. Objectif : « chacun.e chez soi sans perdre la communication et partager les idées ». Rapidement mis en ligne, ce blog réinvente virtuellement le centre de loisirs. D’un côté, l’équipe d’animation fait appel aux compétences de tout le monde (cuisinière, prof de zumba, monitrices et moniteurs, etc.) pour tourner des vidéos loufoques comme la série Alakasa, monter des cours de danse en ligne, partager la recette d’un dessert, proposer des bricolages ou des podcasts à écouter, recenser jeux de société en ligne, etc. De l’autre, beaucoup de familles partagent elles-aussi des ressources, des histoires ou des vidéos comme celle de Gabriel qui répare son skate.
Des ondes relient les gens sous l’étoile
La MQ Sous l’Etoile met en œuvre depuis début avril un projet de webradio. Chaque mercredi, un nouveau podcast invite les habitant·e·s de Lancy à s’évader à l’écoute d’une émission de plusieurs dizaines de minutes mêlant interviews, musiques, blagues, etc. Chacun·e peut aussi y participer activement en envoyant ses propres enregistrements ou un message pour d’autres personnes de la Commune. Quatre podcast sont déjà sortis.
Présence de rue
Oyez, oyez, la Concorde !
A la MQ de la Concorde, on a beaucoup misé sur des projets « low-tech » pour maintenir une présence a minima dans la rue. A commencer par une criée publique. Equipé d’un mégaphone, l’animateur-crieur se déplace une fois par semaine de 16h30 à 19h dans différents lieux du quartier pour porter des messages d’habitant·e·s aux autres : poèmes, chansons, citations, blagues…
Au fil des criées, « nous sommes les porte-voix d’une fraternité du moment qui aide les gens à rester chez eux » explique Thibaut Lauer. « On s’approche des balcons, on récite un conte pour les enfants. Parfois il y a des sourires, des applaudissements. On revoit des visages… C’est important, les visages pour nous. Et puis nous montrons que nous sommes là si besoin ».
Les mains dans la terre
Au dehors, toujours à la Concorde, Gary Mercier, le jardinier de quartier, continue depuis avril 2019 l’animation ateliers collectifs de jardinage. Depuis le début du confinement, le projet se poursuit, en respectant naturellement les distances physiques et les mesures barrières.
Cette activité, une antenne sociale en soi, permet aux participant·e·s de continuer de garder les mains dans la terre. Pendant cette période, outre le liant entre les gens, elle a presque une vertu thérapeutique et les retours sont très positifs. « C’est aussi un petit bout d’égalité de traitement entre les personnes : ces ateliers offrent à ces publics moins favorisés un temps dans un jardin », selon Thibaut Lauer.
Concerto pour balcons aux Grottes
Fidèle à son esprit, Pré en Bulle fonctionne depuis le début de la crise par projet et en réseau. Animateur à Pré en Bulle, Didier Arnoux relève que l’association qui fonctionne depuis toujours sans locaux est habituée à la dématérialisation et aux réseaux sociaux. Mais aussi à une présence d’autant plus importante en rue. Depuis Pâques, Pré en Bulle s’est associé au collectif Du Feu de Dieu pour offrir chaque dimanche aux habitant·e·s des Grottes des « concertos pour balcons ». Du rythme, de l’humour et de la bonne humeur dans les cours intérieures du quartier pour inviter les gens à danser sur leur balcon.
Dans le même esprit, Alois Rigotti, un ado du quartier habitué de Pré en Bulle et régulier contributeur de capsules vidéos, a réalisé Un tour de l’Ilot 13 depuis chez vous, pour s’évader dans le quartier sans sortir de chez soi et renforcer ainsi son sentiment d’appartenance aux Grottes.
Prendre soin des équipes, renforcer les comités
« Nous prenons soin des habitant·e·s. Mais nous prenons aussi soin de nous », explique Leonor Perréard. « Il est important de ne pas mettre la pression sur les équipes, de prendre soin des tensions et de la sensibilité, de veiller à leurs heures de travail et à l’équilibre avec la vie privée, en particulier dans le contexte du télétravail ».
La question du temps de travail s’est posée dès le début du confinement aux Pâquis comme à la MQ Sous l’Etoile. Pour Leonor Perréard comme pour Marie-Louise Schneeberger, présidente de la MQ Sous l’Etoile, il est important d’être à l’écoute des besoins de chaque membre de l’équipe et de maintenir une certaine équité.
Leonor Perréard essaie aussi de limiter les visioconférences d’équipes car même si cela fonctionne bien, ces outils pompent beaucoup d’énergie. À la maison de quartier des Pâquis qui accueille une stagiaire de maturité spécialisée, il a également fallu veiller à ce qu’elle puisse poursuivre son stage et valider son année, en dépit de la situation. La MQ lui a donc proposé de collecter en télétravail des idées de jeux, de recettes de cuisine, d’exercices physiques, etc. et de les envoyer deux fois par semaine aux familles. L’enjeu était de lui proposer une activité qui fasse sens à la fois pour son stage et pour la mission de la MQ.
Prendre soin des équipes signifie aussi les protéger et limiter les expositions au dehors. A la MQ de la Concorde, c’est l’une des raisons pour lesquelles il n’y a qu’une criée par semaine.
« La sécurité sanitaire, le soutien et le suivi des équipes sont de la responsabilité du comité, en tant qu’employeur », rappelle Marie-Louise Schneeberger qui a soutenu dans cette tâche des collègues présidents d’autres centres depuis le début de la crise. « C’est à nous, comité, de prendre des nouvelles de l’équipe et de prendre les décisions ».
Par ailleurs, la crise offre des espaces pour renforcer la cohésion au sein du comité de la MQ et tester des fonctionnements en impliquant davantage les membres les plus récemment arrivé·e·s. C’est aussi toute une chaîne de communication par groupes Whatsapp en cascade qui s’est mise en place de manière organique : entre le comité et les animatrices et animateurs, puis entre ces derniers et dernières avec les monitrices et les moniteurs, puis avec les publics.
Des partenariats vivifiés
Avec la commune de Lancy
Au début de la crise, la priorité de la MQ Sous l’Etoile était de collaborer avec le Service social sur la mise en place et la diffusion du plan de solidarité communal.
« Dans le quartier des Palettes, des jeunes ados avaient absolument envie de se mettre en action pour promener les chiens ou faire les courses… », explique Marie-Louise Schneeberger, présidente de la MQ Sous l’Etoile, « Nous avons donc pris contact avec le Service social de Lancy et nous nous sommes mis à son service ». Toute l’équipe de la MQ s’est également mobilisée et a reçu une rapide formation sanitaire. Animatrices/animateurs et monitrices/moniteurs participent aux courses que le Service social récupère et distribue aux personnes qui ne peuvent pas sortir.
De plus, les animatrices et animateurs de la MQ se sont joint·e·s aux travailleurs sociaux hors murs (TSHM) pour reprendre les tournées dans les rues que les mesures de confinement avaient interrompues. La MQ avait en effet constaté qu’il y avait encore beaucoup d’enfants et d’adolescent·e·s qui tournaient autour de la MQ sans respecter les consignes. « Il nous semblait important qu’il n’y ait pas seulement la police dans la rue mais que des travailleurs sociaux soient également présents », précise Marie-Louise Schneeberger. Sous l’impulsion de la MQ, ces tournées n’ont plus seulement visé les jeunes mais tous les publics. Les binômes ont ainsi pu relayer et expliquer les directives sanitaires, distribuer des flyers en différentes langues réalisés par la MQ avec les numéros utiles, participer à une campagne d’affichage du plan de solidarité communal, et aussi simplement discuter avec les gens et prendre des nouvelles. Ces binômes amènent à faire évoluer les pratiques. Ils ont aussi mis à jour les fichiers des concierges, qui sont autant de relais clés dans les allées : à la fois pour diffuser l’information dans les hall d’immeubles et pour faire remonter des besoins particuliers. « Eux-aussi font un boulot formidable », insiste Marie-Louise Schneeberger. « Cette crise nous permet de renforcer les liens avec eux. Cela laisse percevoir de nouvelles perspectives pour renforcer la proximité dans le quartier à l’avenir ! »
A Pâques, tout comme d’autres centres, la MQ a assuré un « accueil en service minimum » pour les enfants dont les parents étaient sous astreinte. S’y sont joints des enfants suivis par le Service de protection des mineurs (SPMI). Ces accueils organisés en urgence devaient répondre à toutes les consignes de sécurité sanitaire. Les repas de midi ne pouvaient donc pas être cuisinés sur place mais devaient être livrés. Marie-Louise Schneeberger a coordonné la livraison de tous les repas pour tous les centres de Lancy et Onex qui ont aussi organisé ces accueils. C’était la première fois que Marie-Louis Schneeberger s’occupait d’un projet qui concernait tous les centres de Lancy. « D’habitude, nous réfléchissons uniquement pour notre propre centre. Cette crise nous a amené·e·s à réfléchir ensemble pour trouver des solutions. Ce serait bien que cette dynamique puisse se poursuivre à travers d’autres opportunités ou d’autres projets », espère-t-elle.
Une deuxième étape du plan de solidarité communal visera à connecter les ainé·e·s avec les enfants en besoin de soutien scolaire par exemple, des échanges de services visant à renforcer les liens entre voisin·e·s tout en respectant les consignes sanitaires.
Collaboration avec imad en solidarité avec les ainé·e·s
La période est aussi propice au développement de nouveaux partenariats. C’est le cas du côté de Pré en Bulle qui s’est rapproché de l’antenne de imad aux Grottes, et a participé début avril à la préparation de paniers de petits déjeuners livrés aux personnes vulnérables en complément de la prestation de repas à domicile qu’elles reçoivent. En trois jours, l’association a ainsi contribué à préparer près de 3’000 paniers.
Ouvrir des champs de possibles
Les crises sont des espaces d’émergence. Annelise Marti le relève : « la créativité et la capacité d’innovation ont été décuplées ». De nouvelles compétences se sont forgées dans la contrainte tandis que d’autres qu’on ne soupçonnait pas se sont révélées.
Les « lieux confinés » que l’ASC genevoise aura explorés et testés pendant le confinement ouvriront peut-être de nouveaux territoires et de nouveaux champs de pratiques pour les centres. Des projets ont émergé à la faveur de la crise. Ils se pérenniseront peut-être. Ou pas. « La suite du blog ? Bonne question ! » dit Annelise Marti. « Il aura sûrement une incidence sur notre site internet. Mais ce projet demande du temps. Et est-ce que cela fera sens de continuer de l’animer une fois que le confinement sera levé et que le centre sera rouvert ? ». Anticipant le déconfinement, Pré en Bulle a lancé une « super flashmob du déconfinement » qui propose quatre chorégraphies pour danser chez soi en prévision de la sortie ! Et partout, on songe aux centres aérés de l’été et on les prépare…
Comme Thibaut Lauer le rappelle, « l’animation socioculturelle a la réputation d’être réactive. Cette période valorise cette qualité de posture qu’il faudra préserver et soutenir pour le bien de la population ». A Pré en Bulle, cette période vient questionner le rapport à l’espace public : « le confinement nous prive de notre meilleur outil de travail, l’espace public », explique Didier Arnoux. « Cela nous invite à réinterroger sa valeur, à questionner la ville pour qu’elle soit plus participative et offre aux habitant·e·s des espaces plus appropriés aux usages qu’ils et elles en font… ».
Aux Pâquis comme à la Concorde, l’automne devait marquer l’emménagement dans de nouveaux locaux. Une transition importante dans l’histoire de ces deux maisons de quartier et un enjeu supplémentaire s’ajoutant au flou ambiant…
Un grand merci à toutes les personnes sollicitées pour cet article et qui ont pris sur leur précieux temps pour répondre à nos questions.