Partenariat FASe : les coordinateurs région ont leur cahier des charges

Lettre de la Fédération no 4 – Octobre 2016

Depuis le 12 septembre et le vote du Conseil de Fondation de la FASe, les six coordinateurs région de la FASe ont un cahier des charges. Les plus anciens l’attendent depuis leur entrée en fonction… début 2011. Pourquoi a-t-il fallu plus de cinq ans pour voir ce chantier aboutir ? Retour sur les faits saillants d’un dossier particulièrement épineux pour la FCLR et les différents partenaires de l’animation socioculturelle genevoise.

Le contexte

La question des coordinateurs région remonte précisément en 2009 avec un projet de réforme de la gouvernance de la FASe, alors en pleine crise financière. En 2008, le Grand conseil adoptait « en urgence une modification des rapports de force au sein du Conseil de Fondation, pour s’assurer que les pouvoirs publics puissent, avec une majorité, approuver les budgets et permettre le fonctionnement de la Fondation, même s’il y a des désaccords avec les centres ou avec le personnel »[1]. Le paquet de la réforme inclut des postes de coordinateurs région dont les premiers recrutements sont ouverts en novembre 2010 pour des prises de fonction début 2011.

Un premier cahier des charges est établi en avril 2011, que la FCLR conteste. Quelques temps plus tard, elle s’opposera avec la même vigueur à l’introduction des coordinateurs région dans les centres, au motif qu’ils n’ont pas de cahier des charges approuvé par la Convention collective de travail (CCT).

En 2014, un travail de rédaction en commun d’un cahier des charges débute finalement. Après de multiples aller-retours, plusieurs versions différentes, dont une émanant du Secrétaire général de la FASe, finissent par circuler reflétant des désaccords majeurs sur la question de la posture hiérarchique des coordinateurs mais aussi de leurs prérogatives et du lien de subordination vis-à-vis des équipes des centres qui empiètent sur les champs de compétences et de responsabilité des comités des associations de centres.

En début d’année 2016, la FCLR refuse en Assemblée générale la notion de « référent hiérarchique » qui apparait dans la variante proposée par le Secrétaire général et propose à la FASe une contre-proposition de texte. Au moment de sa transmission au Conseil de Fondation de la FASe, une version intermédiaire est par erreur envoyée. La FCLR corrige sa position en juin dernier et obtient de la FASe le report unique du vote au 12 septembre.

De son côté, le Bureau du Conseil de Fondation propose le 22 août des reformulations dans un texte auquel les partenaires Etat et Communes, initialement en faveur de la variante du Secrétaire général, se sont ralliés et dont le Comité de la FCLR juge qu’il va « dans le bon sens » et recommande l’adoption.

Les acquis de la version du 22 août 2016

Le report du vote final du Conseil de Fondation de la FASe de juin à septembre a permis de négocier des éléments du cahier des charges des coordinateurs région qui tempèrent les effets de leur fonction et renforcent les comités dans leur position d’employeurs.

Ainsi, la participation des coordinateurs région dans le pilotage des diagnostics menés à l’échelle d’un quartier ou d’une région est facultative. Elle l’est également au second tour des commissions d’engagement de personnel.

Ces acquis sont déterminants pour la défense des intérêts des associations de centres. Et , sans ce report de vote, une version du cahier des charges beaucoup plus défavorable aux valeurs associatives aurait à coup sûr été adoptée.

La moins mauvaise solution

Le 6 septembre, la FCLR a convoqué une Assemblée générale extraordinaire (AGE) chargée de se prononcer sur trois projets de cahier des charges, dont la dernière variante proposée par le Bureau du Conseil de Fondation de la FASe le 22 août, et de confier un mandat à ses délégués en vue du vote du Conseil le 12 septembre. Le moins que l’on puisse dire est que les débats ont été rugueux autour des principaux points d’achoppement de ce dossier qui en cristallise beaucoup.

D’un point de vue de la gouvernance d’abord, la proposition présentée par le Secrétaire général de la FASe peut-elle cohabiter avec celle du Bureau du Conseil de Fondation ? Cette question est la première qu’adresse l’AGE aux membres du Comité de la FCLR. Une option – stratégique – remporte les faveurs du Comité : renoncer à la variante proposée par la FCLR en février et soutenir la proposition du Bureau du 22 août, sur laquelle des avancées ont été obtenues, pour faire barrage à la variante du Secrétariat général.

Mais en parallèle de la stratégie, le débat revient vite sur le fond. En perspective, la mission de service public confiée à des associations privées, selon le principe de subsidiarité cher à notre système politique. Interrogés après l’AGE, Pierre Varcher, président de la Maison de quartier de St-Jean, et Pascal Thurnherr, membre du Comité de la FCLR et co-président de l’association de la Maison de quartier des Acacias, en regrettent tous les deux la remise en question progressive depuis la réforme de la FASe en 2008 et le renversement de majorité au Conseil de Fondation. « On nous a fait comprendre que le rapport de force sur le partenariat avait changé, explique Pascal Thurnherr. Depuis le retrait du partenaire Personnel en 2013, la FCLR est seule à défendre la vision ‘bottom-up’ de l’animation socioculturelle fondée sur les valeurs associatives et l’autonomie des centres, et à lutter contre le New Public Management. »

Dans ce contexte, la position institutionnelle de la FCLR est délicate. Quelle stratégie adopter sans renoncer au principe fondateur de la culture associative de l’animation socioculturelle tout en étant un partenaire de la FASe et de fait partie prenante de son bon fonctionnement ? Résister à tout crin et risquer finalement de faire adopter la version du cahier des charges la plus défavorable pour les associations de centres, ou s’inscrire dans la co-construction d’un consensus acceptable ? L’exercice relevait du grand écart et l’enjeu était bel et bien dans la capacité de la FCLR à trouver la voie la plus satisfaisante possible pour ses membres comme pour elle-même.

Les tenants d’une position dure ont donné de la voix. Parmi eux, Pierre Varcher a fait valoir qu’une ligne rouge était franchie sur la question hiérarchique. « En restant sur la version que nous avions proposée en février, argumente-t-il dans l’AGE, on est minorisés mais au moins, on ne peut pas nous reprocher d’avoir pris part à une mauvaise décision. Si la FCLR adopte la proposition du Bureau, elle perd son rôle de défenseur de l’animation socioculturelle. » Agacés, les plus pragmatiques, favorables au compromis proposé par le Bureau, estiment que la FCLR ne peut pas toujours être en opposition et que des concessions doivent être faites. Eric Maier, président du Jardin Robinson et centre de rencontres d’Avully, en est persuadé : « on ne peut pas tout mettre dans un règlement, il faut aussi accepter de ne plus être majoritaire au Conseil de Fondation », analyse-t-il après l’AGE. « L’article 42, ajoute-t-il, est un garde-fou » à d’éventuelles remises en question des prérogatives des comités sur la gestion des centres.

Au moment des votes, la tension est vive. Pourtant, la FCLR ne se désunit pas. Son AGE adopte finalement la proposition de cahier des charges du Bureau tout en demandant à ses délégués de défendre un amendement pour la suppression de la notion de référent hiérarchique pour le personnel des centres. Elle donne un mandat clair à ses représentants et adopte ce qu’Eric Maier, interrogé après l’AGE, a qualifié de « moins mauvaise solution ». Pour Pascal Thurnherr, « C’était le plus important ».

Votes de l’AGE de la FCLR – 6 septembre 2016

  • L’AGE a voté à l’unanimité un mandat à ses représentants pour qu’ils s’assurent que les discussions lors du Conseil de Fondation ne portent que sur la proposition de cahier des charges du Bureau
  • L’AGE a donné à l’unanimité moins 3 voix le mandat à ses représentants de proposer un amendement afin que la notion de « référent hiérarchique » pour le personnel des centres disparaisse de la proposition de cahiers des charges du Bureau
  • L’AGE a adopté des consignes de vote pour ses délégués en cas de refus de l’amendement. A la majorité de 17 voix (5 contre, 2 blancs), l’AGE vote pour l’acceptation de la proposition

Le vote du Conseil de Fondation

Le 12 septembre, c’est finalement bien la proposition de cahier des charges du Bureau du 22 août 2016 sur laquelle les membres du Conseil de Fondation de la FASe ont été appelés à se prononcer.

Conformément au mandat que leur a confié l’AGE du 6 septembre, les délégués de la FCLR ont présenté l’amendement supprimant la notion de « référent hiérarchique » pour le personnel des centres voté par ses membres. Celui-ci a été rejeté par 6 voix contre 5 et une abstention. Le Conseil de Fondation a ensuite adopté à l’unanimité la version du cahier des charges des coordinateurs région FASe du 22 août 2016.

A l’issue du vote, les représentants de la FCLR ont par ailleurs souligné l’importance de l’article 42 du règlement interne de la FASe qui précise les responsabilités des comités de gestion des centres, et rappelé la possibilité de réviser ce cahier des charges dans le cadre de l’évaluation de la nouvelle gouvernance et l’élaboration du Projet institutionnel de la FASe.

L’après 12 septembre : vers l’apaisement ?

Ce vote marque une étape importante pour ce dossier touffu, complexe et hautement sensible du cahier des charges des coordinateurs région de la FASe. Et l’essentiel est sans doute sauvé pour la FCLR et ses membres. Reste qu’un sujet aussi clivant peut laisser des traces et soulève nécessairement des interrogations quant à sa mise en œuvre. Après six ans d’âpres débats, comment briser le cercle de la méfiance entre certaines associations de centres et coordinateurs région FASe, entre partenaires de la Fondation, et à l’intérieur même des camps ?

Comment d’un autre côté s’assurer que chacune des parties restera bien dans son champ de compétences ? Cette question en particulier a plané sur l’ensemble des discussions de l’AGE de la FCLR le 6 septembre. L’idée de mettre sur pied un mécanisme interne de « recours Article 42 » en appui aux centres qui rencontreraient des problèmes a déjà été esquissée. « Mais ne serait-ce pas déjà un aveu d’impuissance ? » s’interroge Pierre Varcher après l’AGE. « Attendons de voir comment les choses se passent pour tirer des leçons et évaluer le besoin », propose de son côté Eric Maier.

Entre les lignes

« L’assemblée de la FCLR s’est comportée en véritable partenaire »
Bernard Dosso, président de la FCLR
, se veut optimiste après le vote du 12 septembre et l’adoption à l’unanimité de la proposition du Bureau du Conseil de Fondation de la FASe au sein duquel il représente la Fédération. Certes l’amendement proposé par l’AGE a été rejeté, mais de peu, et surtout, il a été discuté. C’est donc un pas positif pour la FCLR qui « à travers la position de son Assemblée générale, sort renforcée, reconnue comme un partenaire capable de consensus et qu’on écoute. », analyse-t-il, « Cette avancée permet d’envisager l’avenir avec plus de confiance car l’adoption du cahier des charges des coordinateurs région de la FASe clarifie le cadre et donne aux associations les moyens d’affirmer leurs prérogatives ». Pour cela, elles pourront aussi compter sur l’appui de la FCLR qui conforte ainsi son rôle de défense des comités et des associations de centres.

Rapport de la Commission des finances chargée d’étudier le projet de loi du Conseil d’Etat accordant une indemnité annuelle de 23 070 749 F à la Fondation genevoise pour l’animation socioculturelle pour les années 2013 à 2016. Secrétariat du Grand Conseil, 18 septembre 2013 (disponible en ligne sur https://www.ge.ch/grandconseil/data/texte/PL11223A.pdf)

Publié le
Catégorie
: