Coopérer pour agir : la relation bénévoles-professionnel.le.s sous la loupe

Lettre de la Fédération décembre 2016

Tricoter le lien et le tricoter bien… Voilà tout l’enjeu de la coopération entre membres de comités et équipes d’animation. Car, lorsque cette clé de voute de la vie des centres se fissure, elle plonge les individus dans l’incertitude et les structures dans la crise.

En octobre, la FCLR organisait deux rencontres pour échanger entre bénévoles et professionnel.le.s. Auparavant, en septembre, le Secrétariat général de la FASe menait sur ce sujet délicat une formation destinée aux professionnel.le.s. Nous avons recueilli des échos de Guillermo Montano, coordinateur de la FCLR et animateur des ateliers de la FCLR, et les impressions de trois participantes, bénévoles et professionnelles. Regards croisés sur une relation complexe.

Veronika Barta, Nicole Cosseron Rouget et Sarah Aymard sont toutes les trois impliquées d’une manière ou d’une autre dans le fonctionnement d’une maison de quartier. Veronika est co-présidente de la Maison de quartier des Acacias, tandis que Nicole et Sarah font partie de l’équipe d’animation des Maisons de quartier de Carouge et des Avanchets respectivement.

Elles ont en commun d’avoir participé à l’une des rencontres de la FCLR, pour les deux professionnelles d’avoir également pris part à la formation du Secrétariat de la FASe, et de poser un regard rassurant sur ce sujet pourtant souvent perçu comme brûlant. Hasard, toutes les trois vivent une coopération sereine dans leur centre. Mais, elles évoquent chacune des souvenirs d’expériences passées plus difficiles ou les échos de collègues moins heureux dans d’autres centres. L’entrée en matière de la formation du Secrétariat général de la FASe et la session appelée « Le mur des lamentations » sont à ce titre sans équivoque.

La relation, une « dentelle à créer »

L’image de la dentelle utilisée par Nicole Cosseron Rouget pour décrire la relation dit bien le travail d’orfèvre qu’il faut mener de part et d’autre pour construire une coopération harmonieuse. Lucide, elle ajoute : « les ponts ne peuvent se faire que si les gens veulent les faire. Chacun doit faire un bout du chemin », donnant aussi l’exemple de l’arrivée d’une nouvelle présidence dans un centre et des nécessaires ajustements qu’elle induit pour recréer une dynamique.

La qualité de la coopération plonge ses racines dans la qualité de la relation entre les personnes et dans leur capacité à s’entendre. Envisageant la coopération comme une expérience humaine, les ateliers de la FCLR se sont justement attachés à interroger cette capacité en 2016 en travaillant notamment sur les pratiques, les bonnes à reprendre et les moins bonnes à éviter.

Se mettre à la place de l’autre

Dans le cadre de son travail de Bachelor en travail social, Sarah Aymard s’intéresse aux motivations des bénévoles à s’engager au sein du comité d’une maison de quartier et à la relation avec les professionnel.le.s. « Parfois, on voit que les bénévoles ont de la peine à trouver leur place », observe-t-elle. Pour dénouer le problème et créer le lien, il est important de se mettre à la place de l’autre, de comprendre les rôles, les responsabilités et les attentes de l’autre.

« La coopération est un sujet sensible parce qu’elle touche l’interpersonnel et la susceptibilité des individus. En organisant ces ateliers et surtout en les ouvrant aux professionnel.le.s, nous avons voulu introduire la nuance, faciliter l’expression de points de vue constructifs », explique Guillermo Montano.

« La présence des professionnels est un plus », assure Veronika Barta. Les ateliers et le métissage des perspectives ont permis de travailler sur les représentations que chacun.e a de l’autre, mais aussi de comprendre qu’il y a nécessairement un temps d’apprentissage dans la relation.

Lever les tabous

Parmi les questions qui fâchent, la répartition des pouvoirs entre bénévoles et professionnel.le.s est certainement la plus sensible. Entre les comités qui dysfonctionnent et mettent en œuvre des processus peu démocratiques, les professionnel.le.s tentés de s’arroger un pouvoir de gestion par auto-délégation, ou les animateur.trice.s qui s’installent dans une logique de confort et en oublient la réalité du terrain, il y a de quoi mettre de l’huile sur le feu.

En pareilles circonstances, il peut sembler difficile de questionner l’institution. Chacun.e rumine alors dans son coin quand il faudrait au contraire encourager la parole et poser le débat.

« On peut encore rêver ensemble »

Convoquer la nature associative de l’animation socioculturelle pourrait aider à réconcilier les positions. « On a tous réalisé que le bénévolat et la participation citoyenne ont du sens », s’enthousiasme Sarah Aymard. Car comment parler d’engagement militant sans les bénévoles ? Comment faire remonter les échos du terrain auprès des comités sans les animateur.trice.s ? Les maisons de quartier sont des lieux de participation citoyenne fondés sur l’articulation des rôles entre bénévoles et professionnels, et la richesse de la coopération pour faire émerger des projets.

Pour préserver et consolider cette dynamique si précieuse, Veronika Barta lance l’idée d’élaborer ensemble avec la FASe un document de référence, « un guide de ce qui fonctionne bien et de ce que l’on peut essayer de faire pour que ça marche mieux ».

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Renforcer la qualité de la coopération au sein des centres : quelle suite ?

Les ateliers de formation organisés cet automne par la FCLR et le Secrétariat général de la FASe ont posé les premiers jalons d’un processus de convergence engagé par les deux institutions afin d’approfondir les réflexions sur la question et de l’inscrire dans la durée. Les échos ont montré que ce processus répond à des préoccupations prégnantes aussi bien chez les bénévoles des comités que chez les équipes d’animation.

Abordées sous des angles différents, les deux approches finalement se rejoignent et se complètent. En 2017, il s’agira de formaliser cette démarche qui consiste à « parler de coopération en coopérant », et de mettre en place un processus permanent conjoint d’amélioration de la coopération.

La prochaine rencontre sera aura lieu au printemps. Elle sera ouverte aussi bien aux bénévoles qu’aux professionnel.le.s qui plancheront ensemble sur un ou deux thèmes choisis parmi ceux qui ont émergé dans les ateliers de cet automne.

En savoir plus sur la suite du processus: secretariat-regions@fclr.ch

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